Après un démarrage poussif pour cause de toussaint bien occupée et de retour à la maison très tardif, j'ai un peu rattrapé du retard sur la progression idéale théorique (un peu plus de 1600 mots par jour) et vous livre donc un petit extrait de circonstance pour fêter (hum...) ça.
Pour rappel, c'est du premier jet à peine relu, donc soyez indulgents, merci ;)
Elle n’arrive toujours pas à retenir ses larmes, alors que ça fait plus de vingt ans que son père est mort. Son pot de chrysanthèmes à la main, des pomponnettes blanches, elle se tient debout devant la pierre tombale à lire l’inscription sur le marbre rosé : Henri XXXX (1947-1986). Les gens défilent en ce premier novembre radieux. Rose préfère les Toussaint pluvieuses, c’est mieux assorti. Elle n’a d’ailleurs jamais compris pourquoi on avait inséré un soleil rayonnant dans la grille bordant le cimetière.
Manuel s’est éloigné pour la laisser se recueillir tranquillement, mais sa mère s’active autour de la tombe à enlever les pétales charriés par le vent et arracher les plantes fanées. Rose a envie de lui hurler de s’arrêter, qu’elle a besoin de calme pour son rendez-vous annuel. Elle ne dit rien. Elle s’enferme dans son monde et pense à son père qu’elle a si peu connu. Ils n’ont pas grand chose à se dire, ici; elle lui parle tellement souvent. Il est là, chaque jour, dans ses pensées et derrière son épaule à veiller sur elle. Son ange gardien. C’est bien ce que sa mère lui avait dit : que son père était mort mais qu’il la protégerait tout au long de sa vie. Alors la petite fille triste avait choisi une plaque avec un petit angelot en étain et les mots « à mon papa chéri ». A dix ans, Rose savait déjà écrire sans faute le mot anévrysme. Bien sûr, elle en ignorait la signification précise ; elle avait juste compris que ça enlevait les papas aux petites filles. Elle aurait aimé avoir au moins une sœur ou un frère pour ne pas se sentir si seule. Sa mère n’avait pas réussi à tous les remplacer.
Elle pose les pomponnettes sur la tombe, déchire le plastique transparent en commençant par la soudure. Puis elle écarte les tiges pour que les fleurs se distribuent joliment dans leur pot. Satisfaite, le papier plastique à la main, elle s’écarte et adresse une dernière prière à son père. Sans faire crisser ses pas sur le gravier, Manuel se rapproche et pose un bras réconfortant autour de ses épaules. Elle aurait tellement aimé le présenter à son père. Sa mère déplace le pot de chrysanthèmes de quelques centimètres avant de les rejoindre et d’embrasser sa fille.